Publié le 26 octobre, le document final du Synode sur la synodalité suscite finalement peu de débat parmi le clergé et les fidèles. Trop peu ? L’objet de la présente note n’est certes pas de se livrer à une analyse détaillée des aspects théologiques, juridiques et pastoraux de ce texte mais d’en présenter les principaux axes – en fonction de la documentation actuellement disponible en français. Sont présentés ici les cinq thèmes qui structurent le document. Chaque paragraphe de cette présentation reprend le titre des différentes parties du document de synthèse publié par le secrétariat du Synode. L’Union Lex Orandi proposera dans une prochaine livraison les réflexions qu’inspirent ce texte.
Sur la forme, le texte se donne un affichage très spirituel et même évangélique puisqu’il suit avec beaucoup de sensibilité la structure des récits évangéliques de la Résurrection de Notre Seigneur. Par exemple, le synode se définit lui-même comme «une expérience renouvelée de la rencontre avec le Seigneur ressuscité que les disciples ont eue au Cénacle le soir de Pâques ». La référence à la prière revient régulièrement. Le document cherche souvent à donner une dimension spirituelle à des réflexions organisationnelles, démarche sympathique qui semble exprimer l’anxiété des Pères face à une conception trop matérielle des sujets. Par exemple : «Le discernement ecclésial pour la mission (81-86), en effet, n’est pas une technique d’organisation, mais une pratique spirituelle à vivre dans la foi et n’est jamais l’affirmation d’un point de vue personnel ou de groupe, ni ne se résout en une simple somme d’opinions individuelles ».
C’est aussi ce qu’exprime la prière de conclusion adressée à la Vierge Marie, à laquelle sont confiés «les résultats de ce Synode: “Apprends-nous à être un Peuple de disciples missionnaires marchant ensemble : une Église synodale”.
Le cœur de la synodalité
La première partie du texte propose de définir la synodalité comme un processus qui doit impliquer prêtres, religieux et laïcs dans le «cheminement quotidien avec une méthodologie synodale de consultation et de discernement, en identifiant des moyens concrets et des parcours de formation pour parvenir à une conversion synodale tangible dans les diverses réalités ecclésiales ».
L’unité de l’Église n’étant pas l’uniformité, il faut donc apprécier les « contextes, des cultures et des diversités, et des relations entre eux,… pour grandir en tant qu’Église synodale missionnaire ».
Ensemble, dans la barque de Pierre
La deuxième partie de la synthèse est consacrée aux relations qui construisent la communauté chrétienne. Ces relations sont orientées tous azimuts : « avec le Seigneur, entre hommes et femmes, dans les familles, dans les communautés, entre tous les chrétiens, entre les groupes sociaux, entre les religions, avec la création », sans oublier «non plus ceux qui partagent la souffrance de se sentir exclus ou jugés ». C’est là qu’est traitée la question des abus et leur insuffisante prise en compte - ainsi que celle de l’avortement et de l’euthanasie.
Sur ta parole
La troisième partie semblera centrale à ceux qui attendent des réformes structurelles : « Dans la prière et le dialogue fraternel, nous avons reconnu que le discernement ecclésial, le soin des processus de décision et l’engagement à rendre compte et à évaluer les résultats des décisions prises, sont des pratiques par lesquelles nous répondons à la Parole qui nous montre les chemins de la mission ».
Une pêche abondante
La quatrième partie demande de réexaminer le rapport entre la communauté et le territoire, qui était traditionnellement prépondérant – pensons aux structures diocésaines et paroissiales : «l’Église ne peut être comprise sans être enracinée dans un territoire concret, dans un espace et un temps où se forme une expérience partagée de rencontre avec Dieu qui sauve ». Cette conception territoriale subit de plein fouet le dépérissement de l’enracinement des humains dans un lieu fixe. L’Eglise doit dès lors devenir « pèlerine », c’est-à-dire qu’elle doit accepter «de cultiver sous de nouvelles formes l’échange des dons et le tissage des liens qui nous unissent, soutenus par le ministère des évêques en communion entre eux et avec l’évêque de Rome » - et ceci « à une époque où l’expérience des lieux d’enracinement et de pèlerinage de l’Église se transforme ». L’Eglise doit également miser sur les phénomènes de la «mobilité humaine » et de la «culture numérique ».
C’est dans cette partie que sont évoquées deux questions institutionnelles sensibles : les «Conférences épiscopales et Assemblées ecclésiales » et le «service de l’évêque de Rome » (130-139). On notera en particulier le souhait d’une meilleure concertation entre Rome et les Conférences des Evêques, puisqu’«avant de publier d’importants documents normatifs, les dicastères sont invités à entamer u ne consultation avec les Conférences épiscopales et les organismes correspondants des Églises orientales catholiques » (135).
Moi aussi je vous envoie
La cinquième partie du document final présente la mission comme la finalité du synode. Celle-ci passe par un effort de formation ainsi présenté : « en grandissant dans la pratique de la synodalité, (le Peuple) a besoin d’une formation adéquate: avant tout à la liberté des fils et des filles de Dieu à la suite de Jésus-Christ, contemplée dans la prière et reconnue dans les pauvres » (140-151). Cette formation est définie en trois mots : « intégrale, continue et partagée » (143). Dans ce domaine également a été relevée l’urgence de «l’échange des dons entre les différentes vocations (communion), dans la perspective d’un service à accomplir (mission) et dans un style d’implication et d’éducation à la co-responsabilité différenciée (participation) » (147).
Assez bizarrement, au thème de la formation est reliée celui de la «culture de la protection pour faire des communautés des lieux toujours plus sûrs pour les mineurs et les personnes vulnérables ».
Enfin, «les thèmes de la doctrine sociale de l’Église, de l’engagement pour la paix et la justice, de la sauvegarde de la maison commune et du dialogue interculturel et interreligieux doivent également être plus largement diffusés au sein du Peuple de Dieu ».
Philippe Pelissier
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